M. D détenu, a été sanctionné à hauteur de trente jours de quartier disciplinaire, pour avoir exercé des violences contre un membre du personnel pénitentiaire. Il conteste les faits et demande, afin de le prouver, à visionner les enregistrements vidéo opérés sur les lieux par les caméras de sécurité. Cela lui est refusé. Son recours hiérarchique préalable étant rejeté, il saisit le tribunal administratif d'un recours pour excès de pouvoir.
M. D a subi, en l'espère, la sanction maximale encourue par le code de procédure pénale. Rappelons en effet que depuis la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, les quanta de sanctions de cellule disciplinaire ont été réduits de manière significative : le maximum encouru pour les fautes de premier degré définies par l'article R. 57-7-1 est en effet de vingt jours, mais de trente si les faits constituent un acte de violence contre les personnes (C. pr. pén., art. 726 et R. 57-7-47) tel que visé aux articles R. 57-7-1-1° (violence contre les personnels ou personnes en mission ou visite) et R. 57-7-1-2° (violence contre un détenu) (sur cette faute disciplinaire, V. M. Herzog-Evans, 2012, ch. 811). Si les faits étaient bien commis, cette sanction apparaîtrait d'autant plus justifiée qu'avant la loi pénitentiaire, c'étaient quarante-cinq jours qui auraient été encourus. Le changement de perspective induit par la réforme a permis de réduire l'attrait de la sanction de cellule disciplinaire et de la recentrer sur les faits les plus graves, tels ceux de l'espèce. En outre, il est naturel de souhaiter prévenir la commission de tels faits, alors que les surveillants doivent exercer leur métier chaque jour dans l'environnement difficile qui est celui de la prison. Reste qu'en l'espèce l'intéressé contestait les faits et avait suffisamment d'assurance sur ce point pour demander à ce que la preuve puisse en être établie par le visionnage des enregistrements opérés par les caméras de surveillance. Le refus de l'établissement, puis des autorités hiérarchiques était à cet égard pour le moins dérangeant. Comme le tribunal administratif de Dijon le rétorquait à juste titre, rien ne permettait de fonder un prétendu danger pour quiconque, qu'aurait pu causer un tel visionnage. Il est salutaire que ce tribunal ne s'en soit pas laissé compter sur ce point. Son jugement constitue en même temps une avancée certaine en droit disciplinaire. Jusqu'à présent, en effet, les droits de la défense se limitaient le plus souvent à un examen du dossier - par hypothèse incomplet car limité aux seules écritures directement liées à la procédure disciplinaire - et à une plaidoirie (M. Herzog-Evans, 2012, ch. 1116) ou, pour le détenu, à des « observations » (C. pr. pén., art. R 57-7-25, al. 1 ; M. Herzog-Evans, 2012, ch. 1115). En revanche, le droit de la preuve était lacunaire : le droit positif à valeur normative demeurait silencieux et sur la question des témoins (M. Herzog-Evans, 2012, n° 1014.12) et sur celle des preuves matérielles (M. Herzog-Evans, 2012, n° 1014.31 s.). Le tribunal de Dijon fait un pas décisif sur ce point, qui autorise l'accès à des enregistrements, preuve préconstituée dont l'utilité apparaît de ce fait considérable. Le visionnage des enregistrements devrait au demeurant être la règle, dès lors que le lieu de commission des faits était couvert par des caméras.
Rappelons que pour M. D. la sanction litigieuse aura entre-temps bel et bien été purgée, dès lors que ni le recours hiérarchique préalable, ni le recours pour excès de pouvoir auprès du juge administratif n'a d'effet suspensif. C'est pour ce motif que la France avait été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme (AJDA 2011. 139 ; ibid. 1993, chron. L. Burgorgue-Larsen ; D. 2011. 643, obs. S. Lavric, note J.-P. Céré ; ibid. 1306, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2011. 88, note M. Herzog-Evans ; RSC 2011. 718, obs. J.-P. Marguénaud ; ibid. 2012. 208, chron. P. Poncela ; D. 2012. 1294, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2011. 605, obs. J.-P. Céré ; RSC 2012. 208, chron. P. Poncela ; ibid. 263, obs. J.-P. Marguénaud ; D. 2012. 1294, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2011. 605 ; RSC 2012. 208, chron. P. Poncela ; ibid. 263, obs. J.-P. Marguénaud). La question lancinante de l'impartialité des commissions de discipline se pose en outre toujours : si la présence en leur sein d'un assesseur issu de la vie civile constitue une indéniable amélioration (C. pr. pén., art. 726 ; V. M Herzog-Evans, 2012, n° 1111.41 s.), il convient de rappeler que celui-ci n'a pas voix délibérative. En outre, dans certains ressorts, les présidents de tribunaux, en charge du recrutement des assesseurs s'y sont mollement impliqués ou ont fait preuve d'une interprétation exagérément restrictive des conditions posées par l'article R. 57-7-10 du code de procédure pénale. C'est ainsi qu'un grand nombre de nos étudiants se voient refuser la participation à ces commissions, alors qu'ils seraient des candidats naturels - et constitueraient un vivier important et renouvelable - à de telles fonctions. Assurément le droit disciplinaire, lequel s'est certes considérablement amélioré depuis 1996 (surtout si l'on compare avec d'autres droits : V. par ex. S. Easton, 2012, spéc. p. 125 s.), doit encore progresser.